L’histoire de l’OCI, pour Organisation communiste internationaliste est peu connue, alors même que ce groupuscule a formé de nombreux cadres de la gauche et du syndicalisme
L’histoire de l’OCI, pour Organisation communiste internationaliste est peu connue, alors même que ce groupuscule a formé de nombreux cadres de la gauche et du syndicalisme : Jean-Christophe Cambadélis, Lionel Jospin, Jean-Luc Mélenchon et dans un autre genre Benjamin Stora en ont été membres, Marc Blondel et Jean-Claude Mailly en furent très proches. Sans succès électoraux ni incarnation connue, contrairement à Lutte Ouvrière et Arlette Laguiller, et avec beaucoup moins de relais dans le monde culturel et universitaire que la LCR, l’OCI a pratiqué « l’entrisme » bien davantage que ces deux autres formations trotskistes. On sait que les « lambertistes », c’est-à-dire les fidèles de l’ancien chef de l’OCI, Pierre Boussel alias Lambert, ont su s’implanter dans plusieurs structures majeures : le syndicat Force Ouvrière, la FEN, pour Fédération de l’éducation nationale, l’obédience maçonnique Grand Orient de France, également. Et bien sûr, à visage découvert, le syndicat étudiant UNEF-ID. De manière dissimulée, comme Jospin, ou après un ralliement en bonne et due forme, comme Cambadélis, l’OCI a fourni des dirigeants de premier plan au Parti Socialiste, puis à la France Insoumise : Mélenchon, Corbière, etc. Pour autant, les auteurs de ces « histoires secrètes » du trotskisme français refusent le sensationnalisme et s’interroge : à quoi tout cela a-t-il vraiment servi ? Ils font la chronique de la vie interne du groupuscule, marquée par les purges récurrentes, l’autoritarisme et une absence remarquable de lucidité sur la société française que cette organisation prétendait révolutionner. Au fil des pages se dégage une image assez sordide, avec un penchant affairiste de plus en plus marqué. On apprend donc beaucoup sur l’histoire des années 70-80, âge d’or, très relatif, de l’organisation. Mais cela importe surtout par ce qui en reste, avec une culture très particulière qui imprègne la direction de la France Insoumise. D’autant plus qu’au cœur de LFI une organisation joue un rôle aussi discret qu’important depuis quelques années : le POI – pour Parti Ouvrier Indépendant -, énième avatar du parti lambertiste. Détail pittoresque, en 2022 pour la première fois un député a réussi à se faire élire en affichant une étiquette trotskiste, et ceci dans la XIIème circonscription de la Seine-Saint-Denis, grâce il est vrai au logo NUPES… Toute la seconde partie du livre est d’ailleurs consacrée à cette héritage de l’OCI, sans que les auteurs n’évitent toujours des jugements de valeur liés à leurs propres convictions de gauche, ce qui en limitent la portée.
Laurent Mauduit et Denis Sieffert ont tous deux milité au sein de l’OCI au début des années 1970, ainsi que dans le syndicat étudiant UNEF. Le premier a été ensuite journaliste à Libération puis au Monde, avant de cofonder Médiapart. Le second a dirigé l’hebdomadaire Publicis. Ils sont chacun l’auteur de plusieurs essais.
Le trotskisme en général et l’OCI en particulier occupent dans la vie politique française une place sans rapport avec leur faible impact électoral. La connaissance de cette mouvance constitue une clef de compréhension essentielle des mutations de la gauche au cours des dernières décennies, avec une résurgence stupéfiante du « lambertisme » via la France Insoumise. Les deux auteurs étant aussi bien informés que passablement désabusés, ce livre évite la diabolisation aussi bien que la « romantisation » des personnages évoqués. L’impression qui se dégage de cette lecture est celle d’un immense échec, aussi bien sur le plan moral que politique. Pour le militant patriote, il est utile de connaître cette histoire, qui lui donnera maints arguments et lui permettra de mieux comprendre certaines logiques à l’œuvre parmi ses adversaires.